Je plaide coupable. Oui, c’est vrai.
Je suis inscrite au chômage et pourtant je suis partie en vacances. Oh, pas
longtemps, 10 jours, mais quand même je sais, c’est mal.
D’autant plus que je ne suis pas
seulement au chômage, je ne cherche pas un vrai travail en plus. Je cherche du
travail d’artiste.
Oui c’est bien ça, vous m’avez
comprise, même quand je bosse je ne fais rien de productif et c’est encore trop
pour moi il faut que je prenne des vacances. EH BIEN OUI ET CA FAIT DU
BIEN !
Enfin, je veux dire : oui ça fait
du bien mais non je ne vois pas ça de cette manière.
Je sais, je caricature, personne ne
m’a accusée de rien mais quand même j’ai envie d’expliquer. Oui j’ai envie,
alors je vais expliquer que vous le vouliez ou non, de toute façon je m’en
fiche c’est moi qui décide, si vous êtes pas content vous connaissez la sortie
(non pas par là, ça c’est un clic placard, là c’est le clic toilettes…la sortie
c’est par là )
Par le fait de prendre des vacances
d’abord, par le fait de les prendre à Istanbul ensuite, j’ai réalisé que non
seulement la création et la liberté sont bien plus fatigantes et prenantes que
je ne voulais l’admettre ; mais aussi que la création a besoin de vide.
De ce que j’ai vu jusqu’à présent,
l’artiste est comme tout employé de bureau qui se respecte : débordé.
Alors bien sûr, hein, difficile de
savoir qui l’est vraiment et qui fait semblant au point de s’en être convaincu.
Car oui, c’est bien d’être débordé, c’est bien d’en faire beaucoup, d’en faire
trop. Imaginez le manque de sexitude de quelqu’un qui « non, n’a rien de
particulier à faire en ce moment, pas vraiment de projet et du temps pour
lui »… OUI la société va le juger, c’est un GLANDEUR. Et ça c’est naze,
même pour un artiste.
Alors tout le monde fait plein de
trucs, ou a plein d’idées, ou cherche plein d’idées. Résultat, même s’il est
difficile de montrer le résultat concret de ces journées de labeur créatrice, à
la fin, on est crevé. Parce que chercher une idée, ça se fait aussi bien à 15h
devant un ordinateur, qu’à 8h du matin sous la douche (hum…bon ok…9h) ou dans
le métro, du lundi au dimanche.
Il est très très (j’insiste) très
difficile de lâcher son envie d’avoir des idées géniales et sa culpabilité de
ne pas en avoir. Et pour cela, il n’y a qu’un moyen : les vacances,
assumées, éloignées si possible et accompagnée c’est encore mieux.
Au début ce n’est pas complètement
agréable et la petite voix a du mal à se taire, cette petite voix qui dit que
ce petit coin d’ombre serait parfait pour écrire, que cet après-midi inoccupé
pourrait être mis à profit par un envoie de mails ou l’étude d’un scénario, que
cette jupe ne permet pas d’avoir son petit carnet dans la poche et que c’est
contre-productif (alors qu’en vrai je ne l’ai jamais à la main quand je devrais
ce fameux petit carnet). Et puis bon…au bout d’un moment, elle s’endort avec
les cigales et nous fout la paix.
Et bizarrement, c’est quand cette
petite voix STRESSANTE s’est éteinte que l’envie revient ! L’envie
d’écrire, de vivre, de rire, de jouer….pour le plaisir.
Et ce plaisir, où c’est que c’est que
je l’ai retrouvé ? A Istanbul messieurs dames, tout simplement. Oooh je ne
dis pas que je n’aurais pas pu le trouver ailleurs, mais voilà, Istanbul a
quelque chose de spécial. Quelque chose de très agréable que j’ai connu il y a
longtemps et que j’ai retrouvé parfois dans mes voyages, mais dont Paris est
absolument dépourvue.
Je parle de la possibilité et du
plaisir assumé de ne rien faire, au vu et au su de tous, dans la rue, d’être là,
tout simplement.
La flânerie est un art qui s’est perdu
et c’est bien dommage. Mais surtout, c’est un art difficile et qui n’est pas
accessible à tout le monde.
Le vide, le silence, l'oisiveté.
On connaît tous quelqu’un qui ne
supporte pas le silence, et c’est terrible. Ces personnes là nous empêchent de
rêver entre deux phrases, de respirer en observant la rue, de savourer une
pensée qui s’échappe. Il faut absolument qu’elles comblent un silence plein en parlant pour ne rien dire…
Bref, flâner dans Istanbul c’est cela, savourer un moment de vie dans la rue, ne rien faire avec plaisir. Et vu que tout le monde le fait, on en profite d’autant mieux !
C’est le souvenir que je garderai d’Istanbul. Sainte Sophie est incroyable, la mosquée bleue littéralement à couper le souffle, le palais de Topkapi et le souvenir des sultans qui régnaient sur Constantinople impressionnant.
Mais cette ambiance, cette ambiance, la simplicité et la gentillesse des turcs qui boivent du thé à toute heure en regardant leur ville, les petites tables où traine un backgammon, la musique, le chant du muezzin, les chats et les chiens qui se promènent sans que personne ne s’en inquiète et ne les dérange. Tout cela caressé par le vent iodé du Bosphore. A la croisée des continents et des cultures, la modernité a su se faire une place sans déranger les traditions et sans imposer sa vitesse. Seuls les touristes à Sultanahmet semblent courir.
© Diego FUNARO (je ne vais pas mentir, c'est juste pour illustrer ça n'a rien à voir avec Istanbul )
Je suis revenue reposée avec l’envie
de faire, d’être dans l’action, mais je sais que quand l’inspiration manquera,
plutôt que de la chercher, il faudra l’attendre en flânant, en lisant et en
vivant.
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